Contexte
En 1966, les revendications pour l’égalité salariale entre les hommes et les femmes ne sont pas nouvelles. Le Traité de Rome – texte fondateur du marché commun européen dont fait partie la Belgique – stipule que les rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail doivent être égales (Article 119). Néanmoins, ce principe est loin d’être une réalité. La Fabrique Nationale d’armes (FN Herstal) est une entreprise florissante du bassin liégeois. Celle-ci engage un grand nombre de travailleurs, dont environ un tiers sont des femmes. Les conditions de travail de ces femmes y sont exécrables, et le principe d’égalité salariale est loin d’être respecté. Fin 1965, le malaise provoqué par cette inégalité commence à se faire sentir.
Évènements
Le 16 février 1966, lasses d’attendre de voir leur demande d’augmentation salariale se réaliser, quelques 3000 travailleuses de la FN décident d’abandonner leurs machines et de se mettre en grève. Leur revendication est simple : l’application de l’article 119 du Traité de Rome. Sous le slogan « A travail égal, salaire égal », cette mobilisation de grande ampleur durera plus de 12 semaines.
La grève impressionne par sa longueur mais également par le fait que celle-ci ne soit portée que par des femmes, qui organisent rapidement un comité de grève. La mobilisation des travailleuses s’accompagne aussi d’un grand élan de solidarité, que ce soit au niveau local, national ou même international, permettant aux femmes de tenir leur combat dans la durée par l’organisation de collectes de fonds notamment.
Derrière les demandes d’augmentation des salaires se cache une lutte plus profonde pour l’amélioration de la condition sociale des femmes dans la société belge, en particulier de celles qui travaillent. Par leur combat, le rôle et la place des femmes se voient fortement remis en question.
La grève prend fin le 10 mai 1966, par la signature d’un protocole d’accord de conciliation, concédant une augmentation de 2,75 francs de l’heure, inférieure aux demandes des grévistes. La lutte continua par la suite, avec un deuxième conflit en 1974, visant cette fois les conditions de travail et d’hygiène ainsi que les possibilités de promotion au sein de l’usine.
Impact
Aujourd’hui encore, cette grève reste un moment clé dans l’histoire des luttes ouvrières et féministes. Même si leurs revendications ne furent que partiellement entendues, elle eut le mérite d’initier toute une série d’avancées législatives en termes d’égalité salariale un peu partout en Europe. Plus fondamentalement encore, à travers la revendication salariale, les travailleuses ont porté un message fort pour « l’égalité des droits, la dignité ouvrière, la lutte contre toutes formes de discrimination ». Aussi, suite à la grève, la participation des femmes dans les organisations syndicales a été profondément repensée.
Malgré toutes ces avancées, le principe d’égalité salariale entre les hommes et les femmes n’est toujours pas une réalité aujourd’hui, même si l’écart s’est significativement amenuisé.
Sources
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gr%C3%A8ve_des_femmes_de_la_FN_Herstal_de_1966
https://www.iee-ulb.eu/blog/academique/eliane-vogel-polsky-mere-europe-sociale/
https://www.sonuma.be/archive/femmes-de-la-fn-ou-herstal_1
https://www.lacsc.be/csc-liege-verviers-ostbelgien/activites/nos-groupes-specifiques/les-femmes-csc/gr%C3%A8ve-des-femmes-de-la-fn-en-1966
https://www.femmesprevoyantes.be/2017/01/25/greve-des-femmes-de-la-fn-herstal-50-ans-apres-le-combat-continue/
http://sens-public.org/IMG/pdf/SensPublic_Femmes_dans_l_action_militante_Marie-Therese_Coenen.pdf
https://www.humanite.fr/la-grande-greve-des-femmes-machines-pour-legalite-salariale-605953