Contexte
Le milieu des années 90 est le théâtre d’une des plus grandes colères étudiantes de l’histoire en Belgique francophone. Dans un contexte d’austérité et de restrictions budgétaires, le ministre de l’Enseignement Michel Lebrun présente une grande réforme, visant notamment à fusionner les différentes écoles supérieures non-universitaires en « grandes écoles » et à couper dans les budgets universitaires. Cette réforme est fortement décriée par les intéressé.es. Les mobilisations qui s’ensuivent poussent par la suite le milieu étudiant à remettre en question tout le système éducatif dans sa globalité.
Déroulé des événements
A l’annonce du projet du décret « Lebrun » en novembre 1993, divers groupes représentatifs étudiants – dont la Fédération des Étudiants Francophones (FEF) – lancent des campagnes d’information et de mobilisation contre ce dernier. Pour cause : sous-financement, discriminations entre les filières, accès à l’enseignement toujours plus compliqué – notamment pour les plus défavorisés –, surpopulation dans les classes, etc.
En décembre 1993, un premier groupement étudiant se forme : le Conseil des Etudiants Francophones du Type Long (CEFTYL) qui mobilise 1000 jeunes pour manifester dans les rues de Bruxelles. La FEF prend la relève après les examens et organise des piquets de grève. En avril 1994, le pré-décret est adopté malgré les protestations. Le mouvement se répand et en mai, ce sont 3500 jeunes dans les rues de Bruxelles et 3000 à Liège.
A la rentrée 1994, les inquiétudes pour leur présent et futur ne sont toujours pas calmées. La mobilisation étudiante prend de l’ampleur. Le gouvernement propose une nouvelle version du décret, reprenant peu ou prou les mêmes problèmes que le précédent. Le climat s’envenime et 25 000 étudiant·es se mobilisent spontanément dans les rues de la capitale.
Fin octobre, le décret est voté au Conseil de la Communauté Française. Il n’en faut pas plus pour enflammer la mobilisation. Trois mots d’ordre sont lancés : le retrait du décret, le refinancement de l’enseignement, et la désignation de l’enseignement comme priorité politique. Une manifestation rassemble 30 000 étudiant·es à Liège. Puis vient le tour de Namur, Mons, et Nivelles. Le gouvernement accepte de postposer la mise en vigueur du décret Lebrun.
Après une nouvelle action à Namur, le gouvernement finit par céder et confirme le gel du décret. Dans la foulée, il adopte un décret imposant la concertation des étudiant·es pour la gestion de l’Enseignement, le forçant à l’avenir à impliquer les principaux·alles intéressé·es dans leurs décisions. Les deux parties se mettent d’accord pour retravailler ensemble le projet, appelé décret Lebrun II. Ces mobilisations marquent également un moment décisif pour la structuration du mouvement et des syndicats étudiants.
La FEF passe au statut de figure principale du mouvement étudiant.
La recherche de démocratisation de l’enseignement fait ainsi un grand pas en avant, bien que de nouveaux combats doivent être menés les années suivantes pour porter plus loin encore la réflexion sur l’Enseignement en Belgique francophone.
Sources :
Maron, F. (1996). Le Mouvement Etudiant. Courrier Hebdomadaire du CRISP. (1510-1511). pp. 1-53. DOI 10.3917/cris.1510.0001.
En ligne https://www.cairn.info/revue-courrier-hebdomadaire-du…